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Pierre-Guillaume De Roux
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«Vous voyez la montagne, ces collines pareilles à des vagues ; vous voyez des bois et des vergers, le grain mûr des champs, les prairies qui dévalent jusqu'à la rivière. Vous me voyez debout à côté de vous ; vous entendez ma voix. Mais je vous dis, moi, que toutes ces choses - oui, depuis l'étoile qui vient de s'allumer au ciel, jusqu'au sol que nous éprouvons du pied -, je vous dis que tout cela n'est que du rêve et des ombres, les ombres mêmes qui nous voilent le monde réel.
Il y a un monde réel ; mais il est sous cet éclat et sous ces visions, [...] derrière tout cela comme si un voile nous le cachait. Je ne sais si jamais un être humain a soulevé ce voile ; mais je sais que cette nuit, et devant vous et moi, Clarke, il le sera pour d'autres yeux. Peut-être trouverez-vous tout ceci étrange, insensé même : étrange, soit, mais réel ; et les anciens savaient ce que c'est que "lever le voile".
Ils appelaient cela voir le dieu Pan.» Pour que le voile se déchire devant le «grand Pan», le Dr Raymond va user du scalpel et rien moins qu'inciser le cerveau de Mary, sa protégée. Cette opération chirurgicale renvoie-t-elle seulement à l'une de ces spectaculaires expériences dont raffola le XIXe siècle, à la fois scientiste et spirite ? Ou bien s'agit-il de convoquer quelque chose de plus archaïque et autrement plus redoutable - de questionner notre capacité à soutenir le regard de la divinité ? C'est de toute façon l'effroi qui est au rendez-vous : au drame de la jeune Mary va succéder une longue série d'événements aussi troublants que terribles.
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Cela peut arriver n'importe où.
Dans le froid et la pluie d'hiver. Par une chaude après-midi d'été. En pleine ville. Au bord de la mer. Tout près d'un casino ou encore un jour de carnaval où tous déambulent, parfaitement méconnaissables... Soudain quelqu'un vous bouscule et vous voilà nez à nez avec l'être qui a détruit votre existence : le rival qui vous a pris votre fiancée, le père qui ne vous a pas aimé, la maîtresse que vous avez rejetée.
Vous brûlez d'en venir aux mains. Mais non, vous pressentez que tout se jouera autrement. Au-delà de la haine, de l'angoisse et du remords. Autour de vous, la vie continue à suivre son cours : des musiques s'échappent des bars, des voitures accélèrent, des rires résonnent. Et vous pressez l'allure, histoire d'échapper au fantôme du passé qui s'attache à vos pas. Une course-poursuite qui durera toute la nuit.
Jusqu'à échanger enfin un regard, une parole de compassion au point du jour. Neuf nouvelles en forme de déambulations sur le thème des retrouvailles.
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Mon père était né dans les semaines qui suivirent leur retour du Maroc. C'est à partir de ce moment-là que s'établit vraiment le long silence entre mes grands-parents. Augustin quitta l'Armée en 1936, avec une petite retraite. Peu de temps après, à Tours où ils étaient revenus s'installer, il trouva un poste de chef de personnel chez Grossman, une usine de confi serie. On y fabriquait des friandises pour les enfants, des guimauves, des boules de coco, des fi gurines en chocolat, des pochettes surprise. Un ancien militaire était-il à sa place dans une fabrique de rêves pour enfants ? » « Mon père se souvenait d'un voyage qu'ils fi rent ensemble, peut-être en 1947 ou 1948, sur les lieux où Augustin avait combattu pendant la Grande Guerre. La Seconde venait de s'achever. Le pays en portait encore des stigmates, comme d'un refl ux sanglant - des blessures qui étaient surtout gra- vées dans les esprits, orgueil bafoué et rancoeurs, puisqu'on s'était si peu battu, qu'on avait été occupé, que beaucoup avaient collaboré. On se remet plus facilement d'une guerre - on la gagne, on la perd, on se prépare pour la suivante - que d'une occupa- tion humiliante, qui installe pour longtemps des rancoeurs insidieuses, des haines recuites, qui pourrit les consciences. Et la honte aussi, la honte de s'être laissé traiter ainsi pendant quatre années, sous le joug et la botte, et d'avoir permis que se perpètrent les crimes les plus abominables que l'humanité ait connus. Mon père se rappelait le long trajet jusqu'à Verdun, dans la voiture cahotante d'Augustin.
Pourquoi mon grand-père avait-il voulu revoir ces lieux, où il avait souff ert comme un damné pendant quatre ans ? (...) Ils prirent la route du Chemin des Dames, s'arrê- tant à chaque virage. Augustin descendait de la voi- ture, contemplait un moment le morne paysage où se dessinaient encore les cratères laissés par les obus.
Ils visitèrent l'ossuaire de Douaumont, où reposent les restes disloqués de milliers de jeunes hommes à qui on n'avait pas laissé le temps de vivre. Je n'ai su que très tard la réalité de ce voyage, que mon père me raconta après la mort d'Augustin. Je sentais que pendant ces journées, il s'était passé entre eux quelque chose d'in- défi nissable, peut-être d'intransmissible. » Les blessures qu'Augustin a reçues pendant la Grande Guerre ont à jamais compromis ses chances de devenir père. Louise, l'épouse qu'il admire tant, lui donnera pourtant un fi ls, André. S'agit-il d'un miracle ? Le grand silence qui a pesé pendant plus de soixante ans sur le couple semble désigner une toute autre vérité. Le narrateur, naguère très proche d'Augustin, va se mettre en quête de l'histoire secrète de ses grands-parents. Leur séjour au Maroc entre décembre 1929 et juillet 1931, révélé par les Archives militaires, concorde précisément avec celui du Capitaine de Tournon-Brochard, homme du monde, élégant et léger, mais qui, déjà, ne se comporte plus qu'en « survivant ».
Comme une blessure de guerre Bernard Fauconnier extrait littéralement la balle au coeur d'Augustin - l'homme du devoir, le « résis- tant », quoiqu'il arrive, au drame d'une famille fauchée par l'Histoire -, par ce retour pudique et incessant des réminiscences qui se transforment peu à peu en secrets véritables, en aveux tragiques et bouleversants - silences, trahisons, occasions manquées, portraits des êtres, emmurés vivants ; dans une existence subie.
Un silence, c'est la blessure intime racontée comme une vraie blessure de guerre avec en toile de fond les orages d'acier de 14-18 et c'est aussi ce silence, aveugle et informe, de l'après-guerre résonnant dans toute sa violence.
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"Les histoires des vraies gens, on ne devrait pas les raconter autant à la légère." S'il y a bien une chose dont Ethel ne doute pas, c'est qu'elle est juive.
Jusqu'au jour où Côme, son ami chercheur, lui montre en passant la photographie d'une adolescente disparue en 1944. Ethel y reconnaît sa grand-mère, Marie, mais non la croix bien chrétienne qui pend à son cou. Pourquoi sa merveilleuse grand-mère lui aurait-elle menti sur ses origines? Le désarroi de la jeune femme est d'autant plus fort que Marie, frappée d'Alzheimer, ne peut plus s'expliquer. Sous le choc, Ethel décide de mener l'enquête à la place de Côme.
Une imposture qu'elle regrettera amèrement en découvrant ce que dissimule celle de Marie. Un récit sous haute tension et magistralement orchestré.
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Octave, archéologogue en résidence au Caucase, se retrouve prisonnier dans l'ambassade française en état de siège suite à un conflit diplomatique sous haute tension. Les cruautés de l'occupant, la veulerie du Quai d'Orsay et la tentation d'une publicité planétaire via les réseaux sociaux vont précipiter les reclus dans une impasse.
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Dans l'État futuriste d'Europack, conçue comme une gigantesque branche d'ADN reliant les différents nucléo- Paris/Berlin/Barcelone/Naples, etc, l'apocalypse climatique a déjà éclaté. L'éventrement définitif de la couche d'ozone a depuis longtemps sonné le glas des ondes domestiques et du trafic aérien, peu à peu remplacé par les trains-zéphir ultra rapides et capables, quand ils doivent progresser à découvert, de s'entourer d'une gaine protectrice : le générateur de bouclier embarqué peut être déclenché à volonté, même si ce n'est plus guère nécessaire que sur les lignes transversales encore confrontées aux dernières zones rurales. Conséquence directe de l'insécurité écologique, la corruption, étroitement mêlée aux intérêts politiques, bat son plein, symbolisée par l'alliance improbable entre trois hommes : Alessandro Born, le Grand Pensionnaire d'Europack, Glenn Trippa, le chef du puissant Magasin qui a la haute main sur le marché des vox-lifters et le Père Niels à la tête des Jésus m'aime, mouvement de développement personnel qui a juré la perte de l'Eglise. L'enjeu du pouvoir ? La population masculine qui, frappée de plein fouet par le dérèglement climatique, souffre d'une pathologie incurable : la dégénérescence vocale. Faute de remède adéquat, les implants de voix de synthèse font florès. Le Starkvox, infiniment plus coûteux que le Voxup - car plus efficace et moins destructeur à court terme - nécessite d'énormes quantités de Pantatigre, précieuse variété de chanvre. Hélas, cette plante-miracle a peu à peu muté sous l'effet des radiations et, si la formule qui en résulte dope la libido, elle présente aussi désormais de sérieux risques pour la peau, la moelle osseuse, le système nerveux, etc. Un homme, un seul, défie cette triste condition du sexe fort :
Melchior Maluir, le chanteur lyrique, surnommé « Tue-Tête » à cause de sa voix d'or. « Dernier homme chantant », Tue-Tête exerce sur les foules un pouvoir quasi physique. Il est vrai qu'il séjourne toute l'année au Dulce&Decorum, vieil hôtel du nucléo-Amsterdam au luxe visionnaire et bénéficie à ce titre des services empressés, parfois inavouables, du majordome David Adhum, être complexe, à la fois raffiné, discret et décadent, passé maître dans l'art du compromis, gardien des secrets les plus honteux et, malgré tout, humaniste dans l'âme.
Ida Mésange, l'inspecteur de Pack-Stups en lutte depuis des décennies contre les filières de vox-lifters découvre son agent Edilion étrangement assassiné au nucléo-Barcelone : une brûlure intérieure a fait littéralement fondre sa nuque. Un ouvrage repose à côté du cadavre. Entraînée depuis toujours à décrypter inscriptions et graffitis, Mésange y décèle très vite un message caché : Lämplein - Mésange - Amsterdam. Car Edilion était censé lui livrer de précieuses informations sur l'histoire de sa famille. Orpheline, Ida Mésange cherche désespérément la vérité sur ses origines. Elle ignore qu'elle est sur le point de tout en découvrir au péril de sa vie quand elle décide soudain d'assister au prochain récital de Tue-Tête, accompagné de Zoé Zaffius, pianiste non moins légendaire , qui se donne le soir même au Concertgebouw du nucléo-Amsterdam.
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À l'occasion du trentième anniversaire de la mort de Georges Simenon (1903-1989) en 2019, Jean-Baptiste Baronian examine le cas «Simenon» comme s'il dirigeait une enquête criminelle. Simenon est a` la fois victime, coupable et toujours... en cavale. On voyage a` travers les multiples zones d'ombre et non-dits qui planent encore sur son oeuvre et sa biographie pour redécouvrir l'incroyable modernité, la singularité saisissante de cet écrivain.
Un portrait irrésistible et subtil par l'un des plus grands spécialistes de Simenon.
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Lisez les nouvelles de ce recueil, sans doute le plus remarquable de tous ceux qu'a déjà signés Michel Lambert.
Son thème majeur, la solitude, y est traité avec une maîtrise jamais égalée auparavant. De quoi est-il question ? De coeurs brisés, de deuils, de trahisons, d'échecs cuisants ou de secrets de famille... Choses déjà racontées mille fois, dira-t-on. La force mystérieuse et invincible qui monte de ces nouvelles vient d'ailleurs. Elle s'explique par l'art infiniment subtil du dévoilement et du retardement auquel l'auteur a recours pour traduire l'ineffable de la solitude, un drame dont on ne se débarrasse pas en se confiant simplement à une âme compatissante. La solitude épouse, ici, la consistance fuyante des nuages : peuplée d'ombres dont la nature et la forme fantastiques explosent tout à coup pour introduire un autre sentiment connexe au mal être : la terreur. Qu'on ne s'y trompe pas. Le registre de Michel Lambert demeure celui du réalisme, servi par une minutie d'observation et un rare instinct de la montée en crise et des variations psychologiques les plus infimes, quasi météorologiques. Qui mieux que Michel Lambert parvient à ancrer dans le quotidien le plus banal, l'irruption de la fatalité la plus singulière, exprimé par un style soudain magique ? Écoutez les conversations qu'il nous rapporte. Des conversations de tous les jours, qui se poursuivent entre des regards et des gestes, eux aussi, familiers à notre mémoire. Sauf qu'il s'y cache cette troisième présence, brouillant la ligne, celle du double et du doute : quand le personnage se regarde trente ans en arrière et renie tout bas l'être qu'il a été. Aucun secret ne nous est révélé en ligne droite. La solitude s'appuie, ici, sur un réseau de relations complexes, mise en scène d'une manière qui, toujours, obéit au sens de la désorientation et pour cause... La qualité quasi photogénique rendue à l'énigme des personnages frappe peu à peu le regard. Quand leurs silhouettes d'êtres égarés, seuls sur Terre, se détachent tels des fantômes en avance sur leur propre mort. Entraînés par le flux continuel qui animent les grandes villes, ils lèvent aussi les yeux vers le ciel et c'est alors qu'apparait toute la dimension de l'oeuvre lambertienne : quand ce moment d'éternité se fixe, comme en surimpression, divin et consolateur, au-dessus de la solitude si misérable à l'échelle humaine.
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« Un beau matin de printemps, il avait appris dans un couloir de la radio que son émission ne fêterait pas ses dix ans d'existence. Dès septembre, elle disparaîtrait de la grille des programmes. Il était rentré chez lui eff ondré, en rage, un peu ivre aussi. Il lui avait demandé de le rejoindre au plus vite mais elle n'avait pas su trouver les mots pour le consoler, c'était une femme faite pour le bonheur, le faste, qui, plus que lui, croyait en l'avenir. Alors, au moment de le quitter, sur le seuil de la porte, comme elle évoquait la tiédeur de l'air, les arbres qui embaumaient et le bleu pâle du crépuscule et que, soudain, après l'avoir embrassé, elle lui avait murmuré : «Ne t'en fais pas, mon chéri. Quand nous reverrons-nous ?», il l'avait fixée durement et, à l'issue d'un long moment, de sa voix déjà perdue : «Quand ? Le jour de la fin du monde.» » Il y a comme une lumière qui traverse ces multiples mondes. Et qui rayonne au coeur battant des vies qui s'attirent puis s'éloignent.
Lumière vue de tout près dans les yeux de la bien-aimée. Lumière qui brillera une dernière fois dans la nuit la plus longue. Dans cette nuit où l'on s'appelle en secret, où toujoursrenaît l'ardeur intacte.
Un recueil de nouvelles magnétique.
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Philippe, brillant conseiller politique, est de permanence, cette nuit-là, à l'Elysée. Le standardiste du Palais, un ancien du GIGN, se charge de filtrer les appels importuns. Détournement d'avion, panique boursière en Asie du Sud-Est, prise d'otages à la Mairie de Nanterre, frasques nocturnes de personnalités en perdition, etc. ... aucune situation de crise ne semble résister au savoir-faire de Philippe, modèle de sang froid et l'habileté légendaires. Gérer une liste improbable d'évènements sans avoir à réveiller le Président fait partie de sa routine. Mais quand le téléphone sonne à cette minute précise, il est loin de se douter que c'est son propre passé, hanté par la mort et les occasions manquées, qu'il va devoir affronter. Une femme en pleurs est à l'autre bout du fil. Elle est une amie proche du Président. Pas une maîtresse mais une amie. Elle lui doit tout : elle lui doit la vie et s'apprête à la lui rendre. Philippe, bouleversé, pris dans ses derniers retranchements, écoute cette inconnue, Marie, évoquer le suicide. La carapace de cet homme, rendu cynique et froid à force de servir le pouvoir, cède d'un coup au souvenir d'autres vies brisées, celles des fidèles amis qu'il n'a pas su dissuader de passer à l'acte. Décidé à sauver Marie, il cherche à la faire parler, à l'amener à raconter son histoire. A gagner du temps... Une longue et douloureuse « négociation » à haut risque commence.
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Apocalypse (1924), essai publié de façon posthume en Italie, en 1931, car trop subversif pour l'Angleterre de l'époque, est méconnu en France. Il n'a été traduit en français qu'une fois, tant bien que mal, par Fanny Deleuze, en 1978 (Éditions Balland).
Ce texte vigoureux, unique en son genre, consacré à l'Apocalypse de Jean (dernier livre du Nouveau Testament) est un peu le testament du grand écrivain anglais. D'un ton tantôt grave, tantôt humoristique, vindicatif ou familier, il est écrit des deux mains, des deux cerveaux : du gauche, celui de l'érudit, et du droit, celui du poète visionnaire. Très au fait de la science biblique et ésotérique de son temps, D.H. Lawrence en donne une synthèse critique éblouissante, serrée, parfois contestable mais toujours captivante et provocante, menée comme un roman policier : du labyrinthe apocalyptique, il s'agit d'extraire la substantifique moelle, vivifiante pour tous hic et nunc, chrétiens ou non. Cette moelle, il la découvre, et nous l'offre : c'est une vision renouvelée, fraîche et "viride", du cosmos et des liens entre les hommes.
Car ce petit livre très vivant, plein d'élan, d'une audace admirable, réussit une chose fort rare : démystifier sans désenchanter. Il déconstruit, certes, mais reconstruit du même geste.
L'Apocalypse, Revelation en anglais, devient un révélateur de maintes contradictions qui se trouvent au coeur de la conception européenne et chrétienne de l'Histoire.
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Et si c'était à refaire ; chemins de Boris Pahor
- Pierre-Guillaume De Roux
- 13 Juin 2019
- 9782363712967
« Dans toute l'oeuvre du grand écrivain Boris Pahor, Trieste occupe une place fondamentale, générique même ; sa ville est pour lui le lieu de rencontre intime du Karst et de la mer, le carrefour des langues, des cultures et des civilisations, fruit de brassages immémoriaux sur le continent européen. Trieste a aussi prédisposé Pahor à assister au déchirement de l'Europe : il en rend compte en 2006 dans Trg Oberdan, publié en allemand sous le titre Piazza Oberdan et repris en 2018 par les éditions Pierre-Guillaume de Roux sous le titre Place Oberdan à Trieste.
Le discours romanesque de résilience de Boris Pahor se double d'essais militants. Il rejoint en cela le parcours de Stéphane Hessel qu'il rencontrera à plusieurs reprises. En particulier en 2012 à Paris (...) » Guy Fontaine «Et si c'était à refaire - chemins de Boris Pahor», dirigé par Guy Fontaine (Les lettres européennes) a été spécialement édité à l'occasion des 105 ans de Boris Pahor, le chantre de la cause slovène, écrivain mondialement réputé, rescapé des camps auquel on doit l'universel Pèlerin parmi les ombres.
Ce livre d'hommage célèbre l'esprit de résistance et de mémoire.
Il rassemble de nombreuses contributions dont les plus célèbres sont signées Guy Fontaine, René de Ceccatty, Claudio Magris et Stéphane Hessel (entretien inédit avec Boris Pahor).
Enfin le recueil contient trois nouvelles de l'auteur slovène : Le Berceau du monde, Mirage chez Hadès et Vol brisé.
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Publié dans l'hebdomadaire Gringoire en trois livraisons du 31 août au 14 septembre 1939, Le Faux Belge n'est pas à proprement parler un inédit de Pierre Drieu la Rochelle (1893-1945), mais une nouvelle qui constitue l'essentiel de l'épilogue du roman Gilles (paru en décembre 1939), auquel seront ajoutées une dizaine de pages qui mènent le personnage à l'acmé de sa destinée sacrificielle. Ce texte ne fut guère connu que de quelques spécialistes de Drieu (ses biographes Pierre Andreu et Frédéric Grover ou encore Jean Lansard, son meilleur bibliographe) mais, apparemment oublié depuis, il n'a jamais fait l'objet d'une publication en volume et est même absent de l'appareil critique de la Pléiade regroupant plusieurs oeuvres de Drieu !
Le Faux Belge met en scène un certain Walter, prétendument professeur de chimie belge en vacances durant l'été 1936 (Guerre d'Espagne) à Barcelone alors qu'il est en réalité un agent fasciste infiltré. Suite à un sombre quiproquo, Walter embarque par erreur en direction des Baléares, dans un petit avion où sont présents deux communistes, le juif Cohen et le Français Escairolles. L'avion est forcé de se poser à Ibiza. Ignorant si l'île est aux mains des rouges ou des blancs, les passagers concluent sur la plage un pacte d'entraide mutuelle quelle que soit la configuration de forces politiques en présence. Puis ils partent à la rencontre des autochtones...
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Roule vers les beffrois dressés dans la plaine flamande et vers la Hollande des tableaux de Rembrandt ou de Vermeer. Il songe à la femme qu'il vient de perdre et à celle qui surgira peut-être à la faveur du voyage. Condamné à errer éternellement entre deux livres et entre deux femmes, il accomplit sa ronde de nuit, aux frontières du monde visible et du monde intérieur, là où l'amour de l'art, de la littérature et des femmes lui a rendu les vraies raisons d'espérer.
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Découvrez Trois contes allemands, le livre de Luba Jurgenson. "Eh oui, la langue a le pouvoir de raconter à notre place notre passé, sans nul doute, mais je crains qu'elle n'ait aussi cette emprise sur notre futur, c'est pourquoi il convient de bien choisir la sienne. En vouant mes filles à l'anglais, je partais de l'idée que les derniers cataclysmes vécus dans cette langue remontaient à la peste de Londres. (Ce sont peut-être mes lacunes en histoire qui me font dire cela, mais le fait même que ces lacunes puissent exister prouve que j'ai raison. Qui, de nos jours, en parlant des catastrophes ayant secoué l'Allemagne, penserait en premier lieu à la guerre de Trente ans ?). En leur racontant mon histoire en anglais, je l'arrangeais de façon qu'elle entre dans le nouvel emballage. A présent, l'allemand suintait à travers les syllabes lisses que j'avais forgées..." Voici trois temps forts de l'Histoire qui nous entraînent du fond de la Poméranie de 1913 jusqu'au Berlin de 1933, puis du New York des années 50 au Nuremberg de 1946, en passant par le Saint-Pétersbourg de 1880 et le Moscou des années 90. Trois drames de la judéité qui se jouent sur la scène intime des mots, des noms et des accents refoulés.
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Au lendemain de la défaite d'Azincourt, Charles d'Orléans, prisonnier des Anglais, est enfermé dans la Tour de Londres. Il ignore qu'il va y séjourner pendant vingt-cinq ans. Et le lancinant compte à rebours vers une libération in extremis qu'il devra à son demi-frère, le très loyal Bâtard d'Orléans, s'égrène au fil d'une épreuve morale sans nom. Hanté par la vision omniprésente de ses soldats qui agonisent dans la boue d'Azincourt, le prince lutte contre la folie en écrivant, jour et nuit, ces rondeaux, ballades et chansons, d'une douceur ineffable, qui entreront dans la postérité . Mais sans parvenir, hélas, à le délivrer des pires moments de violence politique qu'il se remémore, alors que la guerre entre Armagnacs et Bourguignons a fait de Louis d'Orléans, son père bien-aimé, la victime expiatoire.
Avec son intensité coutumière, Jeanne Champion nous conduit au coeur d'une méditation extrême sur la puissance et le remords.
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Remplir le vaste gouffre où flottaient, à mi-hauteur des collines, des bancs de brumes bleues. De loin en loin, un coup de canon éclatait mais il ne faisait plus partie de la bataille, on avait l'impression que l'obus s'était coincé dans la culasse, soit mauvaise qualité de la poudre, soit que les délicats organes de la bombarde fussent rouillés, et qu'un soldat un peu ahuri avait secoué l'engin pour le mettre à feu - à moins que le coup n'ait été tiré longtemps avant, au cours d'une autre guerre, pourquoi pas, que le bruit n'en ait été retardé indûment.
On voyait s'élever dans la vallée assombrie de grosses boules blanches, vaporeuses, qui montaient tout droit avec des grâces de montgolfières. Dans la plaine, quelques feux s'allumèrent à l'abri des étables et des métairies.
Les soldats, gros comme des insectes, se promenaient dans ces espèces de lampions. Ils avaient fini leur journée. Ils rentraient chez eux pour manger un morceau, et pour préparer leurs outils, réviser leurs escopettes et leurs Winchesters qui avaient si ardemment fonctionné toute la journée." Sur cet étrange théâtre d'opérations, deux soldats recherchent inlassablement leur unité perdue.
Tout un symbole... La guerre qui les a emportés comme deux fétus de paille est elle-même semblable à un brouillard informe, sans commencement ni fin. De quelle guerre s'agit-il d'ailleurs? Les repères temporels semblent s'être, eux aussi, complètement effacés... Réédition d'une rareté de Gilles Lapouge, avec une préface de Christophe Mercier.
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Découvrez Off, le livre de Clotilde Escalle. Pourquoi Violette n'écoute-t-elle donc pas l'élan maternel que lui inspire le petit Arthur, un gamin de six ans de la DASS ? C'est dans un gîte rural où elle séjourne avec son mari pour une semaine consacrée à un reportage culturel qu'elle a fait sa rencontre. Comment Violette peut-elle ignorer ce que le malheureux endure auprès du vieux couple à la tête de la ferme-château : indifférence chez " fausse vieille Maman " et maltraitance pédophile de la part de son ivrogne de mari. Lorsqu'elle ne se promène pas ; bras dessus bras dessous, entre son mari Laurent et son petit Arthur, à travers la campagne ensoleillée, Violette, interviewe Désiré Campana, le conservateur d'un musée local aux trésors dérisoires : un homme accablé par la présence continuelle d'une mère sénile qu'il faut surveiller à tout instant. Violette ne s'étonne pas plus des bizarreries de cette vieille devenue si fragile - s'écriant : " Foutaises ! " à tout bout de champ - que des demandes pressantes d'Arthur - qui rêverait d'en faire sa " vraie " Maman. D'ailleurs ne cherche-t-il pas à se faire adopter par chaque couple sans enfants qu'il réussit à approcher ? De quelque côté que l'on se tourne, l'amour semble impossible. Ce n'est qu'une fois sa mère morte et enterrée que Désiré découvrira à quel point elle lui manque. A quel point la charge qu'elle représentait ne pesait rien en comparaison de sa perte. Quant à Violette et Laurent, n'ont-ils pas mené le petit Arthur en bateau comme prévu dès le départ: " Nous aurons cette cruauté de nous en sentir proches puis de l'abandonner." Mais s'agit-il de cruauté ou d'autre chose : du sentiment qu'on n'était pas taillée pour le " rôle ", qu'on a soi-même été abandonnée, dépassée par le rêve aussi insondable que mégalo de ses propres parents ? D'ailleurs, tout le temps qu'aura duré cette illusion d'aimer, Violette se sera inlassablement repassé le même film à l'abri des regards: sa mère a la beauté panthère d'Ava Gardner, son père la dégaine auréolé de gloriole tranquille du grand John Wayne. Sur leur image glamour, règne un soleil sans partage. Le soleil de l'enfance marocaine où Ava et Wayne étaient encore dans la force de l'âge et du désir. Mais voici que ce soleil change, vacille à la limite de l'éblouissement et de l'hallucination. Emportant les images de ces héros qu'on a d'abord vénérés puis qu'on voit vieillir, rapetisser, souffrir, gémir puis à jamais s'éteindre. Et dire qu'ils ont oublié de vous aimer... Comme si on avait été soi-même " off ".
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« Une thèse justifie-t-elle la souffrance ? Il ne m'autorise pas à la lire, je ne sais rien de lui, de son projet existentiel. Tout ce qu'il veut, c'est me dominer, coucher, me mettre en scène. Il appelle ça Philip Roth et moi.
(...) - Tu dois être heureuse. Un bébé, un mec brillant et sympa, prof à la Sorbonne.
- Brillant ? Tu parles !
L'ombre de Roth planait sur la discussion, on sentait sa présence. Assis ensemble sur le canapé-lit, Hervé et moi échangions nos dernières découvertes concernant l'auteur.
"Je suis dans la thèse, Hervé, " a dit Marie. " Au début, je n'y croyais pas, il m'a menti. Tu te rends compte ? À la soutenance tout le monde saura combien je pèse, comment je fais l'amour, au lit. Des chapitres gênants, inutiles, intitulés Marie au lit, Marie se réveille, Marie fait pipi. " (...) Le médecin ne comprenait rien, il n'aurait pas pu s'imaginer Roth traité sous un tel angle, transformé en histoire de cul. Quand je l'ai accompagné à la porte vers deux heures du matin, il avait le visage blême. Il m'a proposé de garder La leçon.
- Se reverra-t-on? m'a-t-il demandé.
- Pas dans Philip Roth et moi. » Jessie, Américain de 40 ans, vit sa « passion » pour Philip Roth au sens quasi biblique du terme. S'il peine à accoucher de la thèse qu'il consacre à sa célèbre Leçon d'anatomie, c'est qu'il en subit directement les effets dans la vie. Ainsi rend-t-il le romancier seul responsable de la mystérieuse grossesse dont Marie, sa compagne de 22 ans, porte les signes soudains au lendemain d'une intrusion nocturne dans leur appartement parisien.
Quand c'est au tour d'Elizabeth, amie de Marie, d'être sur le point d'enfanter, les doutes ne sont plus permis :
L'érotisme rothien tourne à plein régime ! Tous les efforts désespérés de Jessie pour le contrer n'y changeront rien : il n'existe aucun moyen d'échapper à l'emprise de ce « corps » intermédiaire. Ni la religion ni la philosophie ni la morale ni la psychanalyse ne lui seront du moindre secours. Ce roman obsessionnel et drolatique à souhaits brille par un comique de situation toujours plus croustillant, des dialogues au quart de tour, des échanges de textos au bord de la crise de nerfs et... quelques lettres éplorées à Philip Roth.
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Trois nouvelles crépusculaires sur l'abandon au destin et à la force du temps. Un cordonnier séducteur vieillissant vit sa dernière aventure, un forestier met le feu à sa cabane de bois, le retour apocalyptique des frères Cavalier, attachés à la même monture, l'un vivant, l'autre mort, à la fin de la Grande Guerre.
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Londres, 2000. Traditionnelle et déjantée, capitale financière internationale et centre mondial de la création contemporaine, la ville fascine, attire, inspire. Le narrateur l'a élue en choisissant le très charmant quartier de Chelsea comme lieu de séjour régulier pour ses besoins professionnels. Historien d'art et ethnologue de formation, il a pour métier de fournir à des collectionneurs anglais - dont un certain Sir Harry, financier et esthète - des oeuvres d'artistes italiens des XVIIe et XVIIIe siècles.
Une rencontre avec une jeune femme belle et mystérieuse, Laura, va bouleverser son quotidien. Rome, Venise, Paris, Londres rythment son parcours de chineur sur fond d'attentats, d'émeutes, d'incendies... Jusqu'à l'Afrique qui fera brutalement irruption dans ses rapports professionnels par le biais des "diamants du sang". Se réappropriant sa liberté dévoyée dans un monde saturé d'artifices, il se frayera, en une quête d'amour vrai, une voie salvatrice où Sonia, sa compagne discrète, biologiste, fera entendre sa "voix bleue" immuablement présente.